L’école mondiale 2019 de la TMI célèbre le centenaire de l’Internationale Communiste

Du 23 au 30 juillet, des marxistes venus du monde entier ont assisté à l’école mondiale de la Tendance Marxiste Internationale, dans le nord de l’Italie. Les participants venaient d’aussi loin que le Pakistan, le Canada, le Mexique, le Brésil, le Venezuela et l’Afrique du Sud. Pour l’Europe, des camarades de Grande-Bretagne, d’Italie, de France, d’Espagne, d’Allemagne, de Suisse, de Suède et de Yougoslavie, entre autres, étaient présents. Au total, environ 400 camarades à travers le monde ont pris part à cet évènement exaltant.

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Le thème de la semaine était la commémoration du centenaire de l’Internationale Communiste, ou IIIe Internationale, fondée en 1919. Le Comintern avait été lancé par Lénine et les bolcheviks à la suite de la révolution russe et de la vague révolutionnaire qui avait déferlé sur l’Europe après la Première Guerre mondiale. Elle avait été établie en conséquence de la dégénération réformiste et chauvine de la IIe Internationale, dont les dirigeants avaient permis la « Grande Guerre » en apportant leur soutien à la classe dirigeante impérialiste de leur propre pays.

Après la mort de Lénine, la IIIe Internationale a elle aussi dégénéré, dans les mains de Zinoviev et Staline. Néanmoins, les débats des cinq premières années l’IC fournissent des leçons vitales pour ceux qui, de nos jours, cherchent à renverser le capitalisme. Les succès du Comintern aussi bien que ses erreurs ont été bien compris par tous les camarades le long de la semaine.

Il y a eu d’intéressantes commissions portant sur un grand nombre de sujets, au cours de la semaine. La plupart d’entre eux étaient liés au thème du Comintern, avec des discussions sur les positions théoriques, politiques et tactiques adoptées à l’échelle internationale par les communistes. Elles ont conduit à des discussions et des débats extrêmement captivants sur la question nationale et les révolutions coloniales, le livre de Lénine sur le gauchisme et la tactique du front uni, l’IC et la libération des femmes, et les leçons de la dégénération zinoviéviste et stalinienne du Comintern.

« Une discussion particulièrement d’actualité, a fait remarquer Aaron des marxistes de l’université de Warwick, était celle sur le marxisme et la question nationale et les révolutions coloniales. C’est particulièrement pertinent quand on regarde l’état des pays anciennement colonisés, continua Aaron, qui souffrent toujours du legs de l’impérialisme occidental et de la façon arbitraire dont leurs frontières ont été tracées, ainsi que du fait que leur exploitation économique par les pays capitalistes avancés continue. »

Perspectives pour la révolution mondiale

L’école mondiale s’est ouverte, comme toujours, avec les contributions de camarades du monde entier à propos des perspectives pour une révolution internationale. Les camarades ont rendu compte des évènements tumultueux ayant lieu dans leurs pays respectifs, démontrant l’analyse marxiste des mouvements de masse des travailleurs et de la jeunesse qui éclatent partout dans le monde.

Alan Woods a introduit la discussion, rendant clair pour tout le monde que 2019 allait être une année particulièrement difficile pour le capitalisme mondial. Un des traits les plus remarquables à travers la planète, a souligné Alan, est la façon dont la classe dirigeante a perdu le contrôle de la situation politique en faveur de démagogues peu fiables, dans des pays comme la Grande-Bretagne, les États-Unis et le Brésil, avec Boris Johnson, Trump et Bolsonaro. Cela a généré une profonde crise politique pour la classe dirigeante, avec des divisions émergeant au sommet – une caractéristique qui est fréquemment annonciatrice d’une révolution.

D’un autre côté, a remarqué Alan, la crise du capitalisme signifie que les réformes accordées par le passé ne peuvent plus être concédées par la classe capitaliste. La crise du capitalisme est par conséquent une crise du réformisme également. C’est pour cette raison que la classe ouvrière se tournera de manière croissante vers la route de la révolution.

Des évènements tels que les grèves étudiantes massives et militantes contre le réchauffement climatique, conclut Alan dans sa réponse, sont un indice de la direction que prennent les évènements, à mesure qu’une nouvelle génération se lève pour exiger un changement fondamental de système. Le capitalisme détruit véritablement la planète et menace la survie même de la vie sur terre. La seule solution est une révolution socialiste.

La grande trahison

L’école mondiale de la TMI a aussi été le lieu du lancement du nouveau livre d’Alan Woods : Spain’s Revolution Against Franco – The Great Betrayal (La Révolution espagnole contre Franco – la grande trahison). Le renversement de Franco en Espagne dans les années 1970 est un évènement dont on discute rarement dans la plupart des cercles politiques – précisément parce qu’il s’agissait en réalité d’un mouvement révolutionnaire de la classe ouvrière.

La trahison par les dirigeants réformistes et staliniens, dans ce qui est désormais désigné comme la « transition » espagnole, a néanmoins ouvert la voie à la restauration de la monarchie et la perpétuation du régime réactionnaire franquiste au sommet de la classe dirigeante espagnole.

Lors de l’école mondiale, il y a eu beaucoup d’enthousiasme pour cet incroyable nouveau livre, qui fournit non seulement un récit de première main de ces évènements révolutionnaires, mais aussi une analyse en profondeur des leçons pour les marxistes et les révolutionnaires d’aujourd’hui. En conséquence, les cent exemplaires disponibles ont été rapidement vendus. Mais pas d’inquiétude, les lecteurs peuvent s’en procurer un exemplaire en ligne chez Wellred Books !

La crise en Europe

Parmi toutes ces discussions passionnantes, il y avait également de nombreuses commissions couvrant des sujets relatifs à la théorie marxiste, l’histoire et les évènements actuels. Elles comprenaient des présentations sur l’économie et la philosophie marxistes et la conception marxiste de l’histoire, aussi bien que des discussions sur l’actualité, à propos des crises politique et économique qui submergent l’Europe et le Royaume-Uni.

Dora, des marxistes de l’université de Londres, a fait ce compte-rendu de la commission à propos de la crise de l’Union Européenne :

« Lors de cette commission, nous avons parlé de la dynamique économique du processus de l’intégration en Europe. Le projet initial, tel que le voyait la classe dirigeante française – celui d’une union qu’ils domineraient politiquement, où l’Allemagne ferait office de locomotive économique – a fondu face à la puissance de l’impérialisme allemand. Sous le capitalisme et au sein de l’UE, on ne peut parler de liberté et démocratie tant que le capital règne en maître.

Nous avons également parlé de la division au sein de la gauche sur la question de l’UE, qui s’exprime peut-être le plus vivement en Grande-Bretagne. Plusieurs contributions ont souligné que le Brexit exprime fondamentalement une scission au sein de la classe dirigeante, et qu’en tant que marxistes nous ne devrions pas subordonner notre politique à une aile du patronat ou à l’autre.

Nous devons rejeter l’idée que l’UE est une institution vaguement progressiste, et combattre les illusions parmi ceux qui exigent “[y] rester et réformer”. Néanmoins, nous devons tout autant rejeter la rhétorique pro-Brexit des conservateurs, avec leurs appels chauvins à un retour à la “souveraineté nationale”. Comme l’a déclaré Marx dans le Manifeste, les prolétaires de tous les pays doivent s’unir ! Dans l’UE ou en dehors, notre tâche est de renverser le capitalisme et de lutter pour la transformation socialiste de la société. »

Eleanor, des marxistes de l’université de Norwich, a pour sa part fourni ce compte-rendu de la discussion portant sur la conception marxiste de l’histoire :

« Au cours d’une commission incroyablement riche sur le matérialisme historique, un grand nombre des affirmations mensongères des capitalistes ont été démontées grâce à une analyse scientifique du passé. Par exemple, une des critiques les plus fréquentes qu’on fait au socialisme est qu’il serait contraire à “la nature humaine”, parce que l’égoïsme est soi-disant inhérent aux humains. Cependant, pendant des centaines de milliers d’années, ce n’était pas le cas. Il n’y avait pas de propriété privée, en dehors de quelques possessions personnelles. Comme l’écrivait Engels, ce n’est qu’avec l’apparition de l’agriculture, environ 12 000 ans avant notre ère – avec la production d’un surplus pour la première fois – que les classes ont émergé dans la société, autour de la question du contrôle de ce surplus.

Pour l’essentiel de l’histoire humaine, par conséquent, ce n’était pas dans notre “nature” d’être cupides et d’amasser de la propriété, mais de vivre dans des sociétés nomades et communistes. En résumé, la nature humaine est façonnée par nos conditions matérielles. Et à mesure que les conditions matérielles changent, la nature humaine fait de même. Par conséquent, il est logique que la soi-disant “nature humaine” peut et va changer dans le futur sous le socialisme. Le manque disparaissant, la compétition et l’avidité disparaîtront aussi.

Nous avons aussi discuté de la façon dont toutes les oppressions ont commencé avec le développement de la propriété privée. La société s’est divisée entre les exploités et les exploiteurs, entre les producteurs du surplus et ceux qui le possédaient. La lutte entre ces nouvelles classes signifiait que la classe dirigeante avait besoin de renforcer sa position en oppressant les travailleurs. En quelques centaines d’années, cela conduisit à la création de l’état, qui se réduit à des détachements d’hommes armés pour maintenir la loi et l’ordre, défendre la propriété privée, et faire en sorte que les classes exploitées restent à leur place. Comme le dit une citation célèbre de Marx, “L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de luttes de classes.” Puisque les oppressions sont nées avec la société de classes, la seule façon d’en venir à bout définitivement est de renverser la société de classes. »

Une collecte record qui témoigne de la confiance dans les idées du marxisme !

En plus des nombreuses discussions politiques captivantes qui se sont tenues, il y a également eu un appel à la levée de fonds extrêmement réussi pour le fonds de lutte de la TMI. Cet argent est vital pour aider à maintenir le site In Defence of Marxism et l’enrichir, mais aussi pour tisser des liens entre les marxistes du monde entier : des Amériques à l’Asie, de l’Asie à l’Afrique.

La collecte de cette année a permis d’atteindre un montant record, la somme époustouflante de 135 000 euros. C’est un indice net de l’enthousiasme et de l’état d’esprit optimiste répandu internationalement parmi les marxistes.

Cet optimisme a également été tangible le tout dernier jour de l’école, lorsque les camarades ont parlé du travail qu’ils accomplissaient pour construire les forces du marxisme dans chaque pays. La vue d’ensemble ne laisse pas de doutes : les marxistes grandissent en nombre – aussi bien qu’en qualité – partout dans le monde.

Suivant la tradition, au cours de la dernière soirée de l’école, les camarades ont chanté à tour de rôle des chansons révolutionnaires de leurs pays respectifs. La passion déployée a clôturé de façon appropriée cette semaine incroyable.

Il ne fait aucun doute que les rassemblements internationaux annuels des capitalistes à Davos et ailleurs, ces jours-ci, sont affligés d’un état d’esprit pessimiste. Les marxistes contrastent en étant pleins d’espoir et d’enthousiasme, confiants dans la force de nos idées et dans la possibilité de voir le socialisme de notre vivant.